Alexandre Bennigsen – Les mouvements nationaux chez les musulmans de russie. – le « sultangalievisme » au tatarstan.

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Mirsäyet Soltanğäliev (en russe : Мирсаид Хайдаргалиевич Султан-Галиев, en tatare Мирсәет Солтангалиев, également restranscrit Mirsaïd Sultan-Galiev ; 1892–1940), est un bolchevik tatar qui entra par la suite en résistance contre le pouvoir du PCUS.

 Sultan-Galiev était le fils d’un instituteur, né le 13 juillet 1892 à Elembet’evo, un village du gouvernement d’Oufa(aujourd’hui en Bachkirie) dans l’Empire russe.

Sultan-Galiev a d’abord été séduit par les idées révolutionnaires de 1905. Après la défaite de la révolution, il s’installe à Bakou, où il attire l’attention de Nariman Narimanov. Il découvre les idées révolutionnaires pendant ses études à Kazan. À cette époque, il reçoit ses premières leçons de socialisme avec le futur bolchevique A. Nasybullin et le futur Basmachi A. Ishmurzin.

Diplômé de l’université en 1911, Sultan-Galiev commence sa carrière comme « famélique professeur et bibliothécaire de l’école de village ». En 1912, il commence à publier des articles dans divers journaux en russe et en tatar, sous différents pseudonymes tels que « Sukhoi », « Syn naroda » (fils du peuple), « Uchitel Tatarin (l’enseignant Tatar) », « Karamas kalinets », puis à partir de 1914 sous son propre nom. Durant la même période, il a également secrètement distribué des tracts anti-gouvernementaux dans les villages musulmans du gouvernement d’Oufa et s’est prononcé contre l’installation de Tatars russe ou christianisés comme enseignants dans les écoles musulmanes4.

 

Pendant la guerre civile, il est actif dans l’organisation de la défense de Kazan contre les Blancs en août 1918 puis dans la liquidation de l’opposition après qu’ils en eurent été chassés. Il a également contribué à faire que les populations bachkires, dirigées par Zeki Velidi, rejoignent les bolcheviks affaiblissant ainsi le potentiel militaire de l’armée de Koltchak. Sa connaissance des mouvements nationaux de Sibérie lui a valu la confiance de Staline et de hauts responsables du gouvernement. Sultan-Galiev effectua de nombreuses tâches sur l’ordre personnel de Staline. En avril 1919, il est envoyé à nouveau sur le front oriental pour soutenir le moral de la division 21 Tatar au Malmysh après l’offensive de printemps de Koltchak qui avait forcé l’Armée rouge à abandonner Ijevsk. En juin 1919, il est renvoyé à Kazan, à la demande de l’administration bolchevique locale pour aider à résoudre la question nationale chez les Tatars, mais il est bientôt rappelé à Moscou par Lénine pour travailler sur la question de la nationalité dans les Narkomnats jusqu’en 1922.

Sultan-Galiev a voulu donner une version musulmane au marxisme faisant valoir que les Russes tsaristes avaient opprimé les sociétés musulmanes et pas seulement quelques grands propriétaires fonciers et autres bourgeois. En dépit de cette tentative de synthèse, il était vu par les Bolcheviks comme excessivement tolérant à l’égard du nationalisme et de la religion et en 1923, il est accusé de déviation nationaliste panislamique et panturque, arrêté et chassé du parti. Il est libéré, mais avec la mort de Lénine en 1924, il perd son seul protecteur et reste donc un paria politique, constamment surveillé par la sécurité d’État. Durant ces années, il passe son temps à voyager pour la Fédération de la Chasse et écrit des critiques occasionnelles et des traductions. Il est accompagné de sa seconde épouse Fatima Yerzina, épousée en 1918 et de leurs deux enfants. En 1928, il est arrêté une deuxième fois et condamné en juillet 1930 à être fusillé. Mais en janvier 1931, sa peine est commuée en dix ans de travaux forcés pour nationalisme et activité antisoviétique. En 1934, il est libéré et obtient la permission de vivre dans l’oblast de Saratov. Au début de 1937, il est de nouveau arrêté et contraint de faire une autocritique. En décembre 1939, il est condamné à la peine de mort et exécuté le 28 janvier 1940 à Moscou. Staline n’était pas favorable à la tentative de Sultan-Galiev de faire la synthèse entre l’islam, le nationalisme et le communisme et à prêcher la révolution parmi les régions musulmanes. Staline le fit condamner comme leader indépendant « musulman » .